les voiturettes ont pris un coup de jeune

On les croise dans les centres-villes bondés, sur les parkings des lycées à côté des mobylettes, et même dans les enseignes de la grande distribution : les voitures sans permis (VSP) ont pris, ces dernières années, une place nouvelle dans le marché de la mobilité. Il s’est vendu près de 23 000 voiturettes neuves l’an dernier en France, soit un bond de 70 % par rapport à 2019, selon les statistiques d’AAA Data. Une dynamique qui s’explique en particulier par une refonte en profondeur de l’offre. D’un véhicule vieillot, souvent moqué, ces « quadri cycliques légers à moteur » – comme les définit le code de la route – sont devenus des produits attractifs et modernes grâce au développement de modèles électriques aux designs soignés.

Objet tendance

Une évolution que l’on doit principalement à Citroën et à son Ami : absent du marché en 2019, le constructeur ne vend aujourd’hui pas moins d’une VSP sur quatre, au détriment des leaders du marché, deux autres français, Aixam et Ligier. « D’un véhicule un peu poussiéreux, on est passé à un objet tendance qui séduit une clientèle plus jeune que les utilisateurs traditionnels de la voiture sans permis, observe Jean Ambert, directeur général de Smart Mobility Lab. C’est notamment devenu, pour les parents d’adolescents, une alternative aux transports en commun dans le contexte de la crise sanitaire. » Ces voiturettes – dont la vitesse ne dépasse pas les 45 km/h – peuvent en effet être conduites dès 14 ans, sans le permis B donc, mais tout de même avec un permis AM (l’équivalent du brevet de sécurité routière).

Assurance obligatoire

« Sans permis » ne veut toutefois pas dire « sans assurance » : comme une voiture traditionnelle, les VSP doivent au moins être assurées en responsabilité civile. Depuis quelques mois, les assureurs auto perçoivent, eux aussi, un nouvel élan sur ce segment de niche. « Notre portefeuille est passé de 9 900 contrats d’assurance de VSP en 2019 à près de 12 500 en 2021, et les jeunes représentent désormais 17 % du total », témoigne Dominique Filsjean, directeur groupe au sein de la DGA Assurance IARD de la Matmut. Les mutuelles distribuent essentiellement ces produits auprès de leurs sociétaires déjà en contrat. « L’objectif est de trouver une solution à tous leurs besoins, qu’il s’agisse d’assurer le véhicule de leur enfant ou de les accompagner dans des moments difficiles, comme après la perte de leur permis de conduire », poursuit Dominique Filsjean.

Mais certains courtiers consacrent aux conducteurs de voiturettes des offres spécifiques. « Nous proposons depuis douze ans des monocontrats propres aux VSP, explique Julien Desprez, directeur de l’offre et des partenariats chez Vilavi. Nous avons un portefeuille de 25 000 polices, ce qui représente environ 15 % du marché total, estimé à 170 000 véhicules. Et c’est un segment en forte croissance. »

De son côté, Citroën n’a pas hésité à créer avec le courtier AssurOne une assurance sur mesure pour son Ami. Une première pour le constructeur, qui veut être sûr que ses clients trouvent le bon contrat au bon prix. « Au vu du taux de transformation, notre offre rencontre un vrai succès », se réjouit-on chez Citroën. La question du tarif de l’assurance des VSP est, en effet, centrale. Certains acteurs qui n’assurent que leurs clients existants fixent des niveaux de primes calqués sur ceux des voitures traditionnelles, malgré des ratios sinistres/primes jusqu’à deux fois plus élevés. D’autres facturent au contraire leurs garanties au niveau des équilibres techniques propres à ce segment. D’où des écarts tarifaires conséquents, allant de moins de 300 € par an à plus de 1 800 €. Outre les risques aggravés que présentent des conducteurs ayant perdu leur permis, c’est la nature même du véhicule qui tend à alourdir la facture. « Même si elles vont moins vite que les voitures, les voiturettes coûtent plus cher à assurer car, en cas de sinistre, elles sont souvent qualifiées d’épaves, prévient Julien Desprez. En effet, elles sont conçues comme une cellule unique difficilement réparable après un choc. »

Une segmentation plus fine

Cette hétérogénéité dans les tarifs est en outre amenée à se creuser. « Il faut assurer non seulement les utilisateurs classiques des VSP que sont les personnes âgées et les personnes ayant perdu leur permis, mais également des conducteurs de plus en plus jeunes. Cela implique d’adapter l’offre et d’entrer dans une segmentation plus fine », souligne Franck Pivert, chief revenue officer de Wakam, qui travaille sur le sujet pour plusieurs courtiers grossistes (FMA, Zéphir). AssurOne distingue, de son côté, trois profils possibles pour assurer une Ami, avec des primes allant du simple au triple : un conducteur titulaire du permis et bénéficiant d’un bonus-malus de 0,50 ; ce même conducteur auquel peuvent s’ajouter des conducteurs secondaires sans le permis (ses enfants, par exemple) ; et enfin un conducteur malussé.

Aujourd’hui, on connaît encore assez mal la sinistralité des adolescents au volant de ce type de véhicule. « Nous pensons qu’elle risque d’augmenter, indique Julien Desprez. Pour construire notre offre, nous avons étudié le compor­tement des jeunes conducteurs qui viennent d’obtenir leur permis B et nous avons constaté que, passé quelques mois de conduite, ces derniers se sentent davantage en confiance et commencent à prendre de mauvaises habitudes. C’est pour prévenir ce même phénomène d’excès de confiance dans le cas des VSP que nous venons de mettre en place un partenariat avec les auto-écoles ECF : si un assuré de moins de 20 ans accepte de suivre une formation un mois et demi après l’achat de sa voiturette, il bénéficiera d’une réduction de 10 % sur sa prime. » Des actions de prévention qui devraient se multiplier au fur et à mesure que se développera cette nouvelle forme de mobilité.

Qui conduit une Ami ?

Depuis son lancement mi-2020, la voiture sans permis de Citroën, vendue à partir de 7 390 €, a séduit plus de 9 000 clients en France. Selon le constructeur, 77 % d’entre eux sont des familles, l’Ami étant généralement partagée au sein du foyer par les parents et un, voire deux adolescents. 42 % des utilisateurs ont ainsi moins de 18 ans. Les Ami roulent principalement dans les petites agglomérations et en zones rurales, où les transports en commun sont moins développés : 85 % des clients en font un véhicule complémentaire en remplacement d’un deux-roues.

 

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