Jurisprudence : assurance automobile

Jurisprudence

Date de décision : 29/12/2014

Numéros de pourvois :

388173;14-13.994;14-24.698;14-21.562;15-83.625

Le libre choix du réparateur réaffirmé

Sed lex, dura lex. La nouvelle ne réjouit sans doute pas les assureurs automobile mais, dans le cadre de la loi Hamon, l’obligation d’informer l’assuré de sa liberté de choisir un réparateur après un sinistre leur incombe bel et bien. C’est ce qui ressort du contentieux porté devant le Conseil d’État, par le Conseil national des professions de l’automobile (CNPA), pour faire annuler l’arrêté du 29 décembre 2014 pour excès de pouvoir qui organisait les modalités de délivrance de cette information (CE, 17 février 2016, n° 388173). En effet, dans la version annulée du texte, l’information devait être remise par les réparateurs automobiles. Le nouvel arrêté du 24 juin 2016 remet les modalités d’information en conformité avec la loi Hamon : « La faculté pour l’assuré, prévue à l’article L. 211-5-1 du code des assurances, de choisir le réparateur professionnel auquel il souhaite recourir lui est rappelée de manière claire et objective dès le premier contact de l’assuré avec l’assureur en vue de la déclaration du sinistre. Si le moyen de communication est oral, un écrit, notamment un message électronique ou un message textuel interpersonnel (SMS) spécifique, confirme dans les plus brefs délais cette information ».

L’ivresse des clauses abusives

Sous l’emprise du droit de la consommation… Il faut signaler un arrêt de cassation assez exceptionnel du 12 mai 2016 (n° 14-24.698) dans lequel la Cour de cassation a décidé, à la suite du décès d’un motard qui pilotait en état d’ivresse, que la clause d’exclusion relative à cet état aurait dû être examinée par les juges du fond au titre des clauses abusives. En effet, l’article L. 132-1 du code de la consommation prévoit que sont abusives les clauses contractuelles qui ont pour objet d’imposer au consommateur la charge de la preuve, qui, en vertu du droit applicable, devrait incomber normalement à l’autre partie au contrat. L’assureur devrait donc prouver que l’alcoolémie du pilote a provoqué l’accident pour échapper à la garantie à laquelle il est normalement tenu.

Fiscalité, conclusion de l’affaire Mapfre et ses suites

L’arrêt rendu le 24 novembre 2015 par la Cour de cassation met fin au long épisode judicaire sur la question de la fiscalité applicable aux garanties pannes mécaniques. Au terme de ce dernier, la garantie panne mécanique visée est bien une opération d’assurance qui se voit appliquer la taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA) à 18 % en automobile. Pour rappel, l’affaire était remontée jusqu’à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 16 juillet 2015, Mapfre, n° C-584/13). La Cour européenne avait alors posé comme critère de la qualification d’opération d’assurance, l’indépendance des prestations de vente du véhicule automobile et de la garantie pannes mécaniques. Par suite, la qualification d’opération unique (vente + garantie panne mécanique) conduit alors à retenir l’application de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ; alors que si ces deux opérations sont indépendantes, c’est la taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA) qui doit s’appliquer à la garantie panne mécanique (18 %). À la suite de ce premier arrêt, dans une autre décision qui intéressera toute la profession bien au-delà de la branche automobile, la CJUE a décidé que des « services de règlement de sinistres » – prestation distincte d’une opération d’assurance – doivent se voir appliquer la TVA (CJUE, 17 mars 2016, n° C-40/15).

Jouer au véhicule terrestre à moteur

De façon sporadique, la question de la définition du véhicule terrestre à moteur revient sur le devant de la scène judiciaire (voiturette électrique, tondeuse autoportée, mini-moto). L’enjeu est de taille, puisqu’il s’agit de décider si la loi Badinter s’applique ou non au sinistre. Dans l’arrêt rendu le 22 octobre 2015 (n° 14-13.994), c’est une petite fille de 6 ans au guidon d’une mini-moto qui se blesse en percutant une remorque en stationnement. La Cour de cassation considère que la mini-moto est bien un véhicule terrestre à moteur au sens de la loi Badinter. L’engin « se déplaçait sur route au moyen d’un moteur à propulsion, avec faculté d’accélération, et ne pouvait être considéré comme un simple jouet ». Concrètement, cette qualification, qui permet de mieux cerner la notion de VTM parfois fluctuante en jurisprudence, met en évidence un potentiel trou de garantie : les contrats MRH excluent généralement les VTM – bien que le marché propose de plus en plus d’extension à ce sujet – de leur champ d’application et « le jouet » n’est généralement pas couvert par l’assurance auto obligatoire. Lorsque l’on constate que les magasins de jouets regorgent de « véhicules pour enfants », il serait souhaitable de systématiser la couverture assurantielle d’une façon ou d’un autre.

Il faut signaler un autre arrêt sur les notions-clés de la loi Badinter – celle de conducteur – qui détermine le régime d’indemnisation de la victime. Le non conducteur ne pouvant se voir opposer que sa faute inexcusable. Selon un arrêt du 31 mai 2016 (n° 15-83.625), n’est pas conducteur, l’automobiliste qui se repose à l’arrière de son véhicule à l’arrêt, à la suite d’une panne sur autoroute.

Dommage corporel, du nouveau sur l’offre d’indemnisation

Parmi les nombreux arrêts rendus régulièrement sur la réparation du dommage corporel, il faut signaler celui de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans le cadre de la loi Badinter, qui a décidé que « L’offre d’indemnisation ne peut engager l’assureur que si elle est acceptée par la victime ou ses ayants-droit et qu’aucun texte ou principe n’interdit à l’assureur de la modifier afin de tenir compte de l’évolution de la situation de la victime » (Civ. 2e, 2 juillet 2015, n° 14-21.562). Autrement dit, la Cour de cassation admet que l’évolution de la situation de la victime – son décès dans cette affaire – puisse aboutir au réajustement de l’offre qui lui a été faite, tant qu’elle n’a pas été acceptée. Cette solution est approuvée par la profession qui milite depuis longtemps pour que l’indemnisation puisse évoluer en fonction de la situation réelle de la victime. Cependant, sur le terrain de la rigueur juridique. Le principe posé soulève certaines interrogations. Ainsi, l’article R. 211-30 du code des assurances prévoit déjà qu’en cas de décès de la victime, « Une offre d’indemnité aux héritiers et, s’il y a lieu, au conjoint de la victime est prorogée du temps écoulé entre la date de l’accident et le jour du décès diminué d’un mois ». L’arrêt du 2 juillet 2015 n’y fait pourtant aucune référence. Par ailleurs, la question se pose aussi de la déclinaison du principe de l’arrêt lorsque la victime, qui n’a pas encore accepté l’offre, est vivante. Pour une analyse approfondie : Sylvie Chanh, Jean Péchinot : « Offre non acceptée ne vaut », Jurisprudence automobile, janvier 2016, n° 880.

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